MAISON-MEMOIRE, A la résidence Saint-Michel

Dans le cadre du PACTE Culturel de Lannion-Tregor-Communauté)

DRAC Bretagne - Département des Côtes d'Armor - LTC


Le dossier du projet : PROJET « MAISON-MEMOIRE » A LA RÉSIDENCE SAINT MICHEL de TREGUIER_compressed.pdf 

Les gazettes HABITANTS : HABITANTS numéro 1_compressed.pdf


GENESE DU PROJET

Ce projet est né d’une rencontre entre la responsable d’animation de la Résidence Saint Michel, Stéphanie Francez, et Anne Huonnic, comédienne trégorroise dont le travail de création porte sur le patrimoine de vie et la mémoire et se développe sur le territoire de vie des résidents. 

L’idée d’entreprendre une création participative avec eux s’est inscrite dans une volonté de leur faire expérimenter un processus le plus abouti possible : se souvenir, « écrire » ensemble, restituer. Ce processus, dans le cas de personnes qui ont difficilement accès à une mémoire complète, chronologique, peut se développer autour des « micro-mémoires », souvenirs fragmentaires, déployés en puzzle et qui peuvent être recomposés en « palimpsestes ». Cette forme d’écriture mémorielle part de ce qui nous reste pour plonger dans ce qui est enfoui.

La thématique de la pièce La Faufilée répondait aux attentes de la structure : rassembler des souvenirs, souvent heureux, non-intrusifs, autour des habitats et des habitudes vécues, sans tomber dans une perspective historique mais bien dans une perspective de croisements biographiques qui (re)constituerait une autobiographie collective d’habitants. 

C’est à ce titre que le projet peut aussi se développer de manière intergénérationnelle : nous sommes , nous avons tous, très jeunes et très vieux, déjà été des “habitants”.

Le projet que nous proposons aujourd’hui dans le cadre du PACTE CULTUREL est un « petit projet », basé sur la proximité et le régularité, un projet au long cours sur une seule résidence. Nous pensons qu’il peut toucher les résidents parce qu’il est notamment basé sur des interventions régulières sur 6 mois pour créer des liens et sur une durée qui nous semble raisonnable pour qu’ils puissent suivre le projet dans son intégralité, compte-tenu de leur âge et de l’évolution de leurs capacités physiques et cognitives.

Au delà de l’établissement hospitalier, ce projet va se développer dans un contexte de construction territoriale élargie de la compagnie sur la mémoire (à différents endroits du département) et dans un ensemble d’actions locales développées depuis 2021 autour de la question des habitats. Il doit permettre une rencontre entre différentes structures (école primaire, lycée) et différents habitants.


PATRIMOINE VECU : Nous sommes patrimoine.

Il s’agit de travailler sur un patrimoine de vécu relativement récent, c’est à dire une mémoire «dont on a encore le souvenir». C’est aussi l’enjeu du travail sur le « patrimoine de vie » mené par la compagnie : réactiver des mémoires par un travail sur les sensations. Nous travaillons sur le phénomène des « micro-mémoires »: de tout petits évènements - des habitudes et les sensations qu’ils ont produits - que le souvenir peut réactiver. La sensation (ouïe, vue, toucher, odorat, goût…) peut être une entrée dans l’émotion. Mais elle est présentée comme un phénomène à part entière (ce que j’ai vu, entendu, senti…) afin de ne pas brouiller les cartes entre ressenti (par les sens) et émotion. Nous allons aller rechercher des souvenirs intimes partagés, sans être intrusifs. D’une part, les témoignages sont vécus comme une expérience individuelle du souvenir et, d’autre part, comme un partage désiré.

Les résidents, par leur présence-même dans ce lieu, ont vécu une transformation de leur habitat qui fait entrer de fait une vie extérieure et antérieure (habitat et mode de vie) dans le cadre d’un souvenir. Qu’est-ce qu’ils ont laissé ? Qu’est ce qu’ils ont emporté avec eux, de chez eux ? Qu’est-ce qui se conserve de leur modes de vie antérieurs ?

Du développement de l’électroménager, des médias, de la répartition des tâches, de l’entrée progressive des objets « secondaires », de la décoration, des couleurs, de la permanence des habitudes, de leur transmission, des moments partagés dans les maisons, les mutations ont été et sont nombreuses à l’échelle d’une vie.

Le spectacle portera justement la marque de l’impermanence, des évolutions du lieu et des relations entre les habitants d’un foyer (accumulation, transformation, perte et résilience).



UNE CREATION ENSEMBLE

Nos moteurs seront  : collecter – mettre en mots et en forme – garder des traces.

Nous réaliserons un collectage de témoignages sur les maisons, sur les habitudes et l’évolution de nos habitats (y compris les habitats actuels).

Dans ces ateliers de construction d’une forme, nous allons échanger, c’est-à-dire que la comédienne apporte son témoignage personnel , ses écrits mais également des documents (photographies, sons…) qui servent à nourrir la discussion.

On raconte les histoires associées aux lieux de vie, on remonte aux souvenirs par la sensation.

A travers les histoires individuelles, les sensations exprimées à l’oral sont un commun universel humain, quelque chose de « partageable ». Cela favorise « l’interaction » intra- et intergénérationnelle et le lien social.

Les témoignages seront retravaillés en écriture par la comédienne pour la fois suivante. Le travail est « publié » sous forme de gazette distribuée dans les unités et l’espace commun. Il sera également lu, comme point de départ à la nouvelle séance. Les 10 premières séances ont lieu dans chacune des 5 “unités” de la résidence, les publications sont diffusées dans toutes les unités. Les séances suivantes ont lieu dans l’espace commun  mais les publications continuent d’être distribuées dans les unités. Les textes écrits, les visuels, chansons (...) associés servent de corpus pour construire la présentation. Nous allons construire, progressivement, une forme présentée en fin de parcours à la résidence, en utilisant texte, photographies, sons et objets.

Lors de la présentation commune en fin de travail, les résidents qui le souhaitent pourront porter leurs témoignages oralement. Mais les témoignages pourront aussi apparaître sous forme d’enregistrements associés à des visuels ou encore être portés par quelqu’un d’autre (participant ou comédienne). La restitution sera ouverte aux familles des résidents et aux scolaires.


ACCUEILLIR CHEZ NOUS

Nous, les habitants de Saint-Michel, nous accueillons les enfants et les lycéens chez nous pour des spectacles, des ateliers et des rencontres. On leur fait visiter notre résidence. 

Accueillir c'est peut-être aussi un signe qu'on est chez nous... 

Nous allons proposer 3 spectacles, qui ne sont ni "jeune public", ni "vieux public" mais qui donnent la parole à chacune des générations pour les autres :

Voyages en Cabane qui retrace nos premières tentatives de construction et d'habitation

La Faufilée qui met en scène un homme et une femme qui tentent de dompter leur habitat en co-habitant

et une Nouvelle création in situ (2026 - titre à venir) qui questionnera l'empreinte de nos habitudes lorsque la mémoire nous joue des tours. 

Ce projet s’inscrit dans une démarche de la Cheap Cie autour d’un travail sur la mémoire. Il s’écrit en continuité avec une démarche EAC itinérante à l’écriture : créer en EAC, c’est-à-dire en dialogue avec le public.

Je saisis une thématique qui m’est essentielle à un moment donné de ma vie pour écrire une forme ”racontée”, témoignage intime qui fait appel à des souvenirs, aux sensations les plus précises possibles, quelque chose qu’il faut que je fixe à un moment donné, sans pouvoir forcément le démêler, mais comme un point d’étape mémoriel, une « sauvegarde »… La représentation peut être vue comme une forme de « remémoration » collective. Cette confidence, cette expression des sensations vécues appelle des retours du public, un partage d’expériences proches ou aux contraires très distancées. Le pari est réussi quand mon “effort à dire juste et vivant” suscite chez les spectateurs le désir de dire à leur tour. S’ils racontent, alors j’ai la sensation qu’ils pourront aussi sauvegarder… et transmettre.” Anne Huonnic